Failles
FAILLE(S). " Le 12 janvier 2010 à 4 heures 53 minutes, dans un crépuscule qui cherchait déjà ses couleurs de fin et de commencement, Port-au-Prince a été chevauchée en moins de trente secondes
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FAILLE(S). " Le 12 janvier 2010 à 4 heures 53 minutes, dans un crépuscule qui cherchait déjà ses couleurs de fin et de commencement, Port-au-Prince a été chevauchée en moins de trente secondes par un de ces dieux dont on dit qu'ils se repaissent de chair et de sang. Chevauchée sauvagement avant de s'écrouler cheveux hirsutes, yeux révulsés, jambes disloquées, sexe béant, exhibant ses entrailles de ferraille et de poussière, ses viscères et son sang. Livrée, déshabillée, nue, Port-au-Prince n'était pourtant point obscène. Ce qui le fut c'est sa mise à nu forcée. Ce qui fut obscène et le demeure, c'est le scandale de sa pauvreté. " Ainsi débute ce court texte mû par la double nécessité de dire l'horreur que fut la catastrophe haïtienne et celle de la surmonter. Déambulant dans les rues de sa ville détruite, l'écrivain part de sa propre expérience : avant le séisme, elle projetait d'écrire un roman d'amour. Revisitant le décor ravagé de sa fiction, tentant de la mettre en oeuvre, elle est saisie par l'histoire immédiate. Que peut-on écrire, comment peut-on écrire alors que la réalité même s'est dérobée ?
Pour Yanick Lahens, la faille géologique qui a englouti Haïti en janvier dernier interdit de faire comme si les autres failles - sociale, politique, économique - qui depuis des décennies laminent son île n'existaient pas. Ils étaient nombreux à savoir le danger couru : Port-au-Prince a été par le passé deux fois détruite, et les prévisions des sismologues étaient sans ambiguïté. Ils sont nombreux aussi à savoir que les failles de surface menacent d'entraîner Haïti à sa perte. Le déni ne saurait être, une fois encore, la réponse de l'impuissance. Il n'y a pas de fatalité dans l'exode rural, la paupérisation, la dégradation de la production agricole et de l'environnement : telle est la conviction de l'écrivain qui appelle de ses voeux une intelligence du malheur. Texte de combat, texte animé par l'urgence, texte de compassion aussi, Faille(s) tente de désigner, avec une magnifique pudeur, servie par une écriture à la pointe sèche, l'innommable qu'a été le 12 janvier en Haïti, mais aussi de prévenir de l'irresponsabilité qui consisterait pour les Haïtiens à ne pas changer leurs perceptions et leurs comportements.
Yanick Lahens vit en Haïti. Dans ses romans - Dans la maison du père (Le Serpent à plumes, 2000) et La Couleur de l'aube (Sabine Wespieser éditeur, 2008) - comme dans ses nouvelles et ses essais, notamment L'Exil : entre l'ancrage et la fuite, l'écrivain haïtien (Deschamps, 1990), elle brosse sans complaisance le tableau de la réalité caribéenne. Lauréate du prix RFO 2009 pour La Couleur de l'aube, elle occupe sur la scène littéraire haïtienne une position très singulière par son indépendance d'esprit et l'autorité que lui confèrent ses actions de terrain. Longtemps professeur de littérature, Yanick Lahens consacre aujourd'hui une grande partie de son temps à une fondation destinée à former les jeunes générations aux stratégies de développement durable.
ISBN / EAN | 9782848050904 |
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Genre | Littérature Française Romans Nouvelles Correspondance |
Publication date | 2010-10-04 00:00:00 |
Auteur | Yanick Lahens |
Editeur | SABINE WESPIESER |
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